Selon Jean-François Lisée et Thomas Muclair, l’industrie pétrolière albertaine a coûté au Québec 55 000 emplois manufacturiers entre 2002 et 2007.
Sur quoi repose ce raisonnement ? Sur des fondations assez molles… Selon ces deux gauchistes, l’exploitation des sables bitumineux en Alberta a fait augmenter la valeur de la devise canadienne ce qui a nui aux exportations de l’industrie manufacturière.
S’il est vrai que le pétrole albertain a dopé la valeur du dollar, peut-on pour autant accuser les sables bitumineux d’être responsables de la perte de 55 000 emplois manufacturiers ?
Répondons à cette question en regardant l’évolution de l’emploi et du PIB dans ce secteur de l’économie:
Depuis 2002, on peut effectivement observer un déclin relativement important de l’emploi dans le secteur manufacturier. Par contre, le niveau de production (mesuré par le PIB) est resté relativement stable. Conclusion: on produit autant qu’en 2002, mais avec moins d’employés, autrement dit, la productivité a augmenté. En 2002, chaque travailleur dans le secteur manufacturier produisait 73 151$ et en 2007 on est passé à 83 294$.
L’augmentation de la devise n’a pas détruit d’emplois au Québec. Ce qui a véritablement détruit ces emplois, ce sont les dirigeants d’industries manufacturières qui se sont trop longtemps fiés à une devise faible pour exporter à faible coût. Autrement dit, au lieu d’investir dans leur business pour augmenter leur productivité et leur efficacité, certaines industries ont plutôt décidé de se fier sur une devise faible (un pari complètement stupide). Les industries qui se plaignent que leurs affaires vont mal à cause de l’augmentation du dollar n’ont qu’elles-mêmes à blâmer: elles ont creusé leur propre tombe.
Selon Lisée et Muclair, le Canada devrait pour punir les industries qui fonctionnent bien sous prétexte qu’il faut sauver des industries qui croupissent dans la médiocrité. Il faut dire que le nivellement par le bas, c’est souvent la solution proposée par la gauche.
Au lieu de se plaindre de l’augmentation de la valeur de notre devise, on devrait plutôt s’en réjouir parce que l’on est en train de faire le ménage et de provoquer un phénomène de destruction créatrice qui a trop longtemps été retardé. L’augmentation de la valeur du dollar élimine les industries moribondes ce qui se traduit par une augmentation du niveau de productivité. Autre phénomène non négligeable, avec un dollar fort les importations coûtent moins cher. Cette situation profite à tous les Canadiens.
Affirmer que l’industrie pétrolière nuit à l’industrie manufacturière québécoise est tout aussi ridicule qu’affirmer qu’Henry Ford a causé le déclin des maréchaux-ferrants. Sous prétexte qu’il fallait sauver cette profession aurait-il fallu interdire la construction de voiture ? Poser la question c’est y répondre.
Au fait, quand la valeur du dollar canadien augmente parce que les politiques inflationnistes de l’Administration Obama provoquent la chute du dollar américain, la gauche accuse-t-elle Obama de vouloir détruire l’économie du Québec ?
Sources:
Tableau 282-0012; Tableau 379-0025
Excellent billet! Bien documenté, sensé, contrairement aux deux personnes visées.
En passant, juste comme ça, parceque je lisais les commentaires sur le blogue de M. Lisée (pourquoi son nom est-il féminin?), j’ai un hint sur la voiture électrique. Celle-ci ne sera jamais compétitive, elle doit transporter tout son énergie, alors que les voitues à combustibles ne transporte qu’une part contre 14, puisque la combustion utilise 14 volume d’air par volume d’essance. Je trouvais la réflexion intéressante.
Je ne comprends pas exactement en quoi consiste l’analogie entre l’industrie manufacturière et les maréchaux-ferrants. Serait-il svp possible d’expliquer quel lien tu fais entre les deux concepts ?
Quand Henry Ford a démocratisé la voiture, il est devenu évident que ce moyen de transport allait remplacer le cheval à ± long terme.
Le cheval comme moyen de transport étant appelé à disparaître, une foule de professions gravitant était aussi appelée à connaître le même sort.
Il aurait été ridicule que le gouvernement entrave la commercialisation du « modèle T » sous prétexte qu’il fallait sauver des emplois de forgeron.
Je comprends ça. Mais les vêtements, on a aura encore besoin longtemps, non ? Le pétrole ne va pas remplacer le textile à plus ou moins à long terme.
Ici, l’augmentation de la devise (qui reflète la force de notre économie) élimine des industries qui n’avaient plus leur raison d’être (qui existait simplement parce que notre devise était faible).
Je comprends. Merci.
[…] Antagoniste: Arguing with Idiots: Jean-François Lisée & Thomas Muclair […]
Je conclus aussi que ces industries survivraient sans probleme et auraient leur raison d’être dans un Quebec avec sa propre monnaie, qui serait une monnaie plutot faible bien évidemment LOL
Et c’est ce que ces gens semblent dire, qu’ils aimeraient mieux vivre de shops de vetements, d’électricité abordable et de bas loyers pour tous que de participer au Canada, c’est ca le Quebec libre?
Je suis curieux, disons que le prix de l’aluminium augmente, Alcan considérera-t-elle cela comme un gain de productivité? Serait-ce un signe évident que la compagnie s’est amélioré? Où faudrait plutôt regarder la production en tonne/employé? Ou les deux?
Tiens, je repasse par ici et je tombe sur ce billet. Première impression: la conclusion que D. Gagnon tire de son graphique me semble logique. Mais en y repensant, non, il ne suffit pas que la productivité moyenne des travailleurs augmente dans un secteur pour que les travailleurs y soient plus productifs. C’est un saut logique que D. Gagnon ne peut pas justifier, étant donné qu’il néglige quelques subtilités microéconomiques.
Un petit exemple numérique:
Supposons qu’une entreprise parte d’une organisation qui donne la séquence suivante de productivité du travail :
5$ 5$ 10$ 10$ 10$ 10$ 10$ 10$ 10$ 20$
La première heure de travail apporte 5$ de revenu à l’entreprise(en termes de biens produits), la deuxième, 5$, la troisième 10$ et ainsi de suite.
Cela donne une productivité moyenne des heures de travail de
100$/10= 10$
Maintenant notre entreprise veut augmenter son profit, elle se restructure, elle met à pieds 5 travailleurs et à terme on aboutit à la séquence de productivité du travail suivante :
40$ 30$ 20$ 5$ 5$
Productivité moyenne des travailleurs: 100$/5= 20$.
Mais si on suit le fil de la séquence, on s’aperçoit qu’à mesure qu’une entreprise embauche d’heures travaillées, la productivité des heures travaillée décroit.
Alors quand est-ce que les travailleurs sont plus productifs? Avant ou après la restructuration? Quand la productivité moyenne est de 10$ ou quand elle est de 20$?
Pour ceux que ça intéresse, la productivité de la dernière heure travaillée on appelle ça »productivité marginale du travail ». Une situation où la productivité moyenne du travail augmente est compatible avec une situation où la productivité marginale du travail diminue, c’est ce que je voulais montrer.
Il est É-V-I-D-E-N-T que c’est après, la question ne se pose même pas.
Même si la restructuration n’est pas optimale, elle permet à l’entreprise de produire la même chose avec moins de gens.
Le plan de sauvetage, puisque tu en fais référence, à été concu sous l’administration Bush…
Obama a voté pour…
[…] de la demande globale, innovation, etc). À cet égard, je suis entièrement d’accord avec l’explication de David Gagnon de Antagoniste : « Depuis 2002, on peut effectivement observer un déclin […]
[…] de la demande globale, innovation, etc). À cet égard, je suis entièrement d’accord avec l’explication de David Gagnon de Antagoniste : « Depuis 2002, on peut effectivement observer un déclin […]